“LE MARCHE DU BUREAU EST UN ANIMAL CAPRICIEUX"
Christian Sibilde (DDS & Partners) se penche sur le marche du bureau
Le marché du bureau est un animal capricieux. Ceci se remarque du moins à Bruxelles où l'inoccupation des bureaux est inquiétante. Mais où nous constatons aussi que les bureaux sont dépassés après vingt ans de service. L'environnement, la conjoncture, la congestion et la nouvelle façon de travailler ainsi que la centralisation des services publics comme à Gand, Bruxelles ou La Louvière forment une tendance qui raccourcit nettement l'espace de bureau.
PROPRE COURSE
“Cette année, nous existons depuis dix ans", confie Christian Sibilde, l'un des trois associés de DDS & Partners. Le bureau est établi Avenue Louise dans un étage en haut qui offre une vue sur une partie de la ville de Bruxelles. Nous voyons les espaces verts et la ville, le calme et le bruit, l'ancien et le nouveau. La ville est un conglomérat de styles de construction et parfois aussi très peu élégant. Pas très loin, le caractère urbain bruxellois fourmille sur un agréable square du Châtelain à un jet de pierre du bureau et de la maison Victor Horta dans la rue Américaine. Sibilde connaît l'agitation de la ville en sa qualité de véritable Bruxellois et son accent est aussi flanqué de sonorités chaudes: “Nous occupons une position centrale, quoique nous nous soyons souvent demandé si nous ne serions pas mieux logés dans la périphérie. Finalement, nous avons décidé de rester ici.“
Votre bureau de conception existe depuis dix ans, mais si j'estime votre âge, vous êtes sans aucun doute depuis longtemps dans le métier?

Christian Sibilde: “C'est exact. Avant, j'étais associé au sein du bureau Atelier d'Art Urbain qui a vu le jour en 1979 sous l'impulsion de Sefik Birkiye, né à Ankara." Il a définitivement mis un terme à cette phase en suivant son propre cap avec DDS & Partners. La moyenne d'âge dans le bureau est de 35 ans. “Nous sommes un jeune bureau et travaillons en Belgique et à l'étranger." Le terrain est surtout le marché des projets. Récemment encore en Egypte, un marché désormais agonisant et quasi à l'arrêt. Sibilde désigne une construction bloc élancée avec un revêtement bizarre et déclare: “Regardez, c'était un immeuble de bureaux que nous devions construire en Egypte, mais hélas, il est resté dans les tiroirs. Ce n'est certainement pas un marché facile. Dans ce pays, nous avons le problème que tout y est très bon marché par rapport à l'étranger. Mais les marges sont particulièrement petites et il faut se battre pour donner une valeur ajoutée architecturale. Mais nous voyons de plus en plus que l'architecture concerne surtout l'urbanisme, et les qualités urbanistiques sont aujourd'hui fortement privilégiées. C'était aussi le cas au dix-huitième siècle quand nous avons vu apparaître à Bruxelles des îlots d'urbanisme moderne, et la couleur des façades était décidée d'en haut."
EFFONDREMENT DES PRIX
Les activités de DDS & Partners se concentrent surtout sur les logements, les hôtes, les magasins et les shopping malls, … Seuls 10% de ses activités visent le marché du bureau contre 70% de logements. Des chiffres éloquents quant à la situation du marché du bureau. Christian Sibilde: “On murmure que 2 millions de mètres carrés d'espace de bureau sont à l'abandon. Comptez sur certainement 1,5 million de mètres carrés. Les prix se sont effondrés." Christian Sibilde renvoie aux bâtiments à proximité immédiate de l'avenue Louise: “Un bureau entièrement rénové se loue généralement entre 220 et 240 euros/m² sur base annuelle. Un bâtiment comme celui que nous occupons, coûte entre 120 et 150 euros/m² sur base annuelle, à peine la moitié! Il montre l'autre côté, là, c'est seulement 95 euros par m² sur base annuelle. Ce sont de réels prix de dumping et cela prouve aussi les difficultés actuelles pour Bruxelles. A Diegem, les prix se sont totalement effondrés, on y trouve un espace de bureau à 75 euros par m². Mais autour du quartier de la Gare du Nord et du rond-point Schumann, c'est inoccupé."
MARCHE DE LA RENOVATION CROISSANT
Quels marchés distinguons-nous sur le marché du bureau?
“Un: une demande croissante de rénovation, car de nombreux bureaux sont vieillots et ne satisfont plus à la situation actuelle du travail, ni aux performances énergétiques exigées. Ajoutons que, d'un point de vue administratif, vous devez aussi naviguer entre les écueils à Bruxelles comme le temps d'attente pour l'obtention d'un permis, comptez sur un an et demi avant d'obtenir un permis. Le temps de passage y est considérablement allongé. Nous n'opérons pas qu'à Bruxelles. A Anvers dans la Desguinlei, nous avons rénové la tour Vivium de 15.000 m² en collaboration avec l'ancien maître de l'ouvrage d'Anvers, Christian Borret." L'immeuble de bureaux de Vivium datant des années 80 a été dénudé jusqu'au squelette et rhabillé. La rénovation comportait toutes les techniques et finitions, avec aussi la rénovation de la façade complète. Depuis la rénovation, la tour fait honneur à son surnom de palais des glaces, la façade est plus lisse et aussi miroitante qu'avant.
Christian Sibilde: “Dans le domaine des performances d'énergie, elle satisfait aux exigences contemporaines avec un niveau K de K38 et un niveau E d'E70. De plus, cet immeuble a reçu une attestation 'Very Good' BREEAM. Dix-sept étages de bureau, un étage technique et deux niveaux souterrains abritent 14.000 m² en surface et environ 5.000 m² de superficie souterraine."
ARCHITECTURE POSTMODERNE
Sibilde relève encore un projet de bureaux pour lequel son bureau a effectué une profonde rénovation. Il vise l'ancien immeuble de bâtiments BULL qui a été construit en 1985 selon un concept de l'architecte René Stapels près de la station Mérode et du Parc du Jubilé. Avec ses façades polychromes aux tons orange et bleu, c'est un modèle d'architecture postmoderne des années 80. Le bâtiment, ancien siège de la Commission européenne et aujourd'hui propriété de P&V Assurances, a subi des travaux de rénovation étendus qui ont été achevés en mars 2015. Pour DDS & Partners, ce fut un défi de respecter et de 'relire' le bâtiment dans sa valeur architectonique'. “Nous nous sommes surtout axés sur l'aménagement intérieur", déclare Sibilde. “Ceci est un segment de marché de la promotion, parce que nous avons entièrement adapté le bâtiment aux besoins aujourd'hui à l'ordre du jour. Le marché de la promotion se situe notamment dans le Boulevard Albert II dans le Quartier Nord; les immeubles de bureau recyclés ont été préparés à une expérience de bureau actuelle."
BRUXELLES PASSIVE
“Les bureaux passifs constituent le second segment de marché dans la construction de bureaux. Nous constatons que ce marché croît considérablement et que la Région de Bruxelles-Capitale assume ses responsabilités. Pour chaque permis d'urbanisme demandé à partir du 1er janvier 2015 en Région bruxelloise pour la construction ou la rénovation lourde d'une maison, d'un immeuble de bureaux ou d'une école, le standard passif devra être respecté. L'accord 'Passif 2015' signé fin octobre 2012 par la ministre bruxelloise de l'Environnement, Evelyne Huytebroeck, engage tous les acteurs principaux du secteur de la construction à appliquer le standard passif depuis 2015. Pour Bruxelles, c'est une 'révolution'. La région de Bruxelles-Capitale devient la première région au monde à introduire le standard passif. Il n'y a même pas dix ans, Bruxelles se caractérisait surtout par ses bâtiments énergivores. Bruxelles figure à présent dans le top trois des villes ou régions passives en Europe." Pour terminer, Christian Sibilde distingue un troisième marché. “En Wallonie, à peu près 60.000 Wallons retournent travailler dans leurs villes. A Namur, nous construisons, à l'exception de 20.000 m² de bureaux, encore 12.000 m² de maisons. Ceci répond entièrement aux nouvelles tendances du logement et du travail au même endroit. Ceci implique que la mobilité est prise en compte. Nos activités se déploient dans ce domaine à Mons, Liège et Charleroi. De nouvelles tendances sociales demandent du reste une nouvelle configuration urbaine." ?