“Limiter sa croissance est plus dur qu'on ne le pense”
la ‘bonne’ croissance selon L’architecte paysagiste Ken De Vos
Après quinze ans, l’entreprise de Ken De Vos est devenue une référence dans la région de Lievegem. “Je crois fermement à l'entrepreneuriat local. Bien ancré dans votre région, vous vous développez par vous-même. Pourtant, la croissance n'est pas forcément un cadeau: si les choses vont trop vite, vous risquez de ne pas pouvoir suivre le rythme. Nous avons fait des choix clairs l'année dernière: nous allons nous spécialiser davantage dans les projets globaux avec piscines, et nous allons sous-traiter d'autres activités à des spécialistes de la région qui, à leur tour, nous donneront du travail.“
Une croissance bien cadree
Le parcours de Ken De Vos n'est pas commun. Diplômé en psychologie, il a d’abord travaillé pour Electrabel, où il a rapidement progressé vers un poste élevé. “J'ai commencé comme responsable de la planification pour le district d'Evergem, mais je suis vite devenu responsable de la Flandre, puis de la Belgique. C'était un bon poste, mais c'était dur et j'étais parti de cinq heures du matin à huit heures du soir. A un moment, j'ai commencé à avoir des crises d'angoisse. Puis j'ai réfléchi à ce que je pouvais et voulais faire. J'ai grandi à la campagne, j'avais déjà la main verte et je me suis dit: je pourrais travailler en tant qu'indépendant et bien gagner ma vie. J'ai commencé une formation d'architecte de jardin en 2005 et suis immédiatement devenu indépendant complémentaire; et depuis 2007, je suis architecte de jardin indépendant à temps plein. C'est un métier merveilleux. Vous réalisez des projets complets sans aller aux quatre coins du pays. Je suis beaucoup plus détendu.“
Faire les bons choix
L'entreprise de Ken De Vos a rapidement évolué: en 2009 à peine, elle engageait son premier collaborateur, et aujourd'hui, Ken travaille avec une équipe de dix personnes. En 2012, l'entrepôt devenu trop petit était remplacé par un plus grand; en 2017, ce dernier était à son tour devenu trop petit et un nouvel entrepôt a dû être construit. L'année dernière, Ken De Vos a modifié la structure de sa société. “Limiter sa croissance est plus dur qu'on ne le pense. Vous faites quelque chose, vous voulez le faire bien, et tout s'enchaîne. Je n'aime pas devoir dire 'non' aux gens. Lorsque nous travaillons dans un jardin, c'est inévitable, on finit toujours par nous demander de faire l'une ou l'autre chose en plus. Je devrais répondre que ce n'est pas possible, que nous pouvons revenir dans six mois. Mais je n'y arrive pas. Par contre, l'année passée, j'ai décidé de limiter notre champ d'action: j'ai défini nos points forts, les choses que nous faisons nous-mêmes et celles que nous confions en sous-traitance. Nous avons donc cessé d'installer l'électricité. Nous avions l'habitude de le faire nous-mêmes, maintenant nous faisons appel à un électricien. Il est plus rapide et plus efficace. Nous continuons à vendre des abris de jardin et des portails en bois, mais je laisse le montage à un menuisier. Je continue à tout coordonner, rien ne change pour le client, mais je travaille davantage avec des spécialistes. Nous collaborons de plus en plus dans la région, je soutiens vraiment l'entrepreneuriat régional. C'est un véritable échange: vous transmettez le travail à des spécialistes et vous récupérez des chantiers également.“
piscines
“Nous voulons nous concentrer sur les projets de piscine. En ce moment, nous avons beaucoup de demandes. La crise du coronavirus a certainement donné un coup de pouce supplémentaire au secteur, car les gens ont compris qu'ils allaient devoir limiter leurs déplacements et leurs voyages, mais cet effet s'est atténué entre-temps. Mais en dehors de cela, beaucoup d'autres piscines sont déjà commandées, en raison du temps plus chaud et plus sec. Quand il fait trente degrés, tout le monde veut une piscine. Il s'agit souvent de décisions impulsives. Si vous y répondez vite, vous vendez plus. Les chantiers de piscines sont également plus faciles à planifier: deux équipes qui se chargent des terrassements et une équipe qui installe les piscines. Cette dernière peut se déplacer chaque semaine et l'autre équipe dispose de deux semaines pour tout terminer. Il y a donc un roulement. Aujourd'hui, il faut se spécialiser. Je veux toujours continuer à faire des projets complets, mais de manière relativement ciblée. Quand on veut tout faire, on ne fait rien de bien.“
personnel
“Je peux aujourd'hui compter sur dix collaborateurs fixes et je me suis rendu compte par moi-même que c'est très bien ainsi. Je veux continuer à travailler à l'échelle régionale et je veux aussi avoir une vie à côté de mon travail. J'ai travaillé très dur pendant quinze ans; maintenant, je veux essayer de respecter mes week-ends. Je suis joignable de 7 heures à 19 heures, après quoi je range mon smartphone.“ Néanmoins, Ken De Vos n'exclut pas totalement une nouvelle croissance. “Si vous pouvez me trouver dix bons travailleurs demain, ils peuvent commencer tout de suite. Trouver de bons employés est un gros problème - je pense que c'est le cas pour tous les entrepreneurs indépendants. Qu'est-ce qu'un bon travailleur? Quelqu'un qui sait faire quelque chose et qui est également motivé. Malheureusement, cette combinaison est rare. J'ai déjà travaillé avec des - bons! - ouvriers qui étaient absents deux, trois jours par semaine, et ce pendant des mois. Impossible de prévoir un calendrier dans ces conditions. L'ordre et la propreté sont aussi souvent un problème.“ A la question de savoir où les trouver du coup, la réponse est quelque peu surprenante: “Chez nous. Nous devons mieux éduquer nos jeunes. Je ne dirai pas que nous avons été parfaitement élevés, mais on nous a inculqué le respect et l'éthique du travail. C'est ce qui manque à certaines personnes - tout autant qu'à certaines personnes qui ont déjà la quarantaine, vous savez.“
De grosses lacunes
“Les jeunes ont malheureusement trop de lacunes dans leurs connaissances pratiques. Nous travaillons avec des écoles pour les stages - sept de nos dix travailleurs ont été engagés ici après leur stage. Il pourrait y en avoir beaucoup d'autres, mais malheureusement, beaucoup de jeunes arrivent sans jamais avoir utilisé une scie. En quinze ans, le métier d'entrepreneur de jardin a beaucoup changé. C'est devenu beaucoup plus technique, il faut pouvoir tout faire. Dans les écoles, on met encore trop l'accent sur la connaissance des plantes. J'ai formé mon propre personnel pendant des années, mais maintenant je ne peux plus - mes employés et moi n'avons plus le temps. Vous perdez juste trop de temps et d'argent si vous devez former la personne que vous engagez.“
L’importance d’une bonne communication
en ligne…
Ken De Vos a fait développer un magnifique site Web, qui mise tout sur une communication très claire. Pendant la crise du Covid-19, l'entreprise a fermé pendant trois semaines, une décision qui a été clairement expliquée sur le site Web. “J'ai décidé que pour des raisons de sécurité, je ne voulais pas mettre en danger mes travailleurs. Je ne voulais pas non plus avoir à fermer mes chantiers au compte-gouttes. Les machines auraient été éparpillées un peu partout et tout serait en suspens. Nous avons donc terminé les chantiers entamés et avons ensuite examiné la situation à tête reposée. Nous devions organiser les chantiers de manière contrôlée. Je n'ai que cinq camionnettes, donc je ne pouvais compter que sur cinq personnes. Les gens l'ont bien compris, mais il faut l'expliquer. Un site Web est un outil idéal pour cela. J'y ai consacré beaucoup de temps et d'efforts.“
… et hors ligne
“J'essaie toujours de communiquer de manière transparente dans la vie réelle. J'essaie d'utiliser le moins de règles et de systèmes possible. En quinze ans, je n'ai jamais demandé à personne de signer quoi que ce soit; tout repose sur la confiance. Et je n'ai jamais eu de problèmes. J'essaie de sentir les gens. Si quelqu'un ne me fait pas bonne impression, je ne vais pas plus loin. Il doit y avoir comme un déclic. J'utilise deux principes simples: nous essayons d'éviter les nouveaux quartiers et les jeunes. Ma clientèle a entre 40 et 70 ans. Ces personnes ont un certain budget et savent comment tourne le monde. Les jeunes estiment moins bien le coût des choses et sont déçus lorsqu'ils comprennent qu'ils vont devoir encore attendre avant de réaliser le jardin de leurs rêves. Je ne veux pas décevoir les gens.“
Boutique en ligne
Tuinen De Vos dispose également d'une belle boutique en ligne, mais rien ne peut y être commandé. “Les gens peuvent voir nos réalisations et nos prix. Mais ils ne peuvent pas commander, pour ne pas risquer de les faire attendre des semaines. J'ai donc désactivé l'option de commande. S'ils veulent quand même commander, ils demandent un devis, sans paiement. Ensuite, je vérifie personnellement ce que nous avons en stock, et si nous avons ce qu'il faut, j'envoie une offre: alors seulement le client paie, puis je livre. Si vous automatisez, vous risquez de vous retrouver avec des clients insatisfaits: ils doivent attendre trop longtemps ou il y a eu un problème lors de la livraison ... La communication entre les personnes et les ordinateurs implique toujours une marge d'erreur. J’ajoute donc mon intervention personnelle. Mon nom est associé au site, et si les gens sont frustrés en ligne, cela peut avoir des conséquences pour toute l'entreprise - d'autant plus que nous, en tant qu'entrepreneurs de jardin, sommes souvent le dernier maillon du chantier et que les gens ont souvent déjà eu des problèmes. Avec les critiques en ligne et les réactions sur Facebook, votre réputation est rapidement faite ou détruite. Pour l'instant, je gère tout moi-même: site Web, réseaux sociaux, courriels, devis, calendrier, commandes, suivi du site, signature et rendez-vous avec les clients. J’aimerais trouver quelqu'un pour le faire, mais je ne peut pas juste engager un profil administratif, il faut que ce soit quelqu'un qui ait de l'expérience et des connaissances techniques. L’idéal, ce serait quelqu'un qui a travaillé longtemps dans les jardins mais qui ne veut ou ne peut plus faire le travail de terrain. Concevoir et aménager des jardins est vraiment passionnant. Quand je vois - dans la vie réelle, mais aussi sur les réseaux sociaux - comment nous participons au bonheur de nos clients, je sais que ma mission est accomplie.“