LA DURABILITE AU SENS LARGE
Realisation de grands batiments passifs grace à un mix de techniques durables
Pendant la conception et la construction de la Maison de l'Emploi d'Ixelles, le bureau d'architecture A2M a travaillé en étroite collaboration avec le bureau d'étude Crea-tec afin de réaliser un immeuble parfaitement intégré dans le tissu urbain du quartier et ayant un impact minimal sur l'environnement.

TERRAIN ET SITUATION
Le terrain à bâtir est situé au coin de la place Fernand Coq et de la rue du Collège à Ixelles. Il se trouve en face de la maison communale et est resté une terre vague pendant près de trente ans. Le terrain présentait un dénivelé important et était aussi couvert d'une végétation dense composée d'arbres et de plantes aux racines superficielles qui ne présentaient aucune valeur écologique.
Enfin, la parcelle est très encerclée par d'autres immeubles et deux mitoyennetés qu'il fallait respecter. Il était donc très important d'éviter de concevoir un immeuble monobloc et sombre.
Solution
La solution pour l'implantation de l'immeuble et la conception des volumes est basée sur trois points essentiels:
- Visuel, ouverture de l'immeuble sur la rue et son environnement;
- Lumière, profiter au maximum de la lumière naturelle;
- Passive, optimiser les stratégies passives.
APPARENCE EXTERNE
A2M a mis au point une solution élégante en prévoyant une percée dans la façade qui traverse le bâtiment jusqu'au patio central et identifie clairement l'entrée. Pour briser la monotonie de la grande surface de la façade, de grandes baies vitrées ont été aménagées de façon séquentielle. Enfin, la façade est recouverte de lattes en bois qui vieilliront au fil du temps. Grâce à ces solutions, le bâtiment est intégré dans l'ensemble du quartier sans pour autant devenir anonyme.
LUMIERE NATURELLE

Compte tenu de la nature fermée du terrain à bâtir, il y avait un réel danger que le bâtiment devienne un bloc monolithique et sombre. A2M a donc conçu le bâtiment de manière à ce qu'il y ait un maximum d'éclairage naturel. Derrière la façade, les volumes se réduisent en montant les étages de manière à créer un grand puits de lumière. A l'arrière du terrain, un autre puits de lumière plus petit forme aussi une percée jusqu'au sous-sol. Ainsi, presque toutes les pièces du bâtiment ont accès à la lumière naturelle. L'éclairage artificiel est géré par des détecteurs d'absence et de luminosité afin de réduire automatiquement l'éclairement artificiel et supprimer ainsi toutes consommations inutiles.
SYSTEME PASSIF AUSSI POUR LES GRANDS BATIMENTS
Alors que le passif n'était pas exigé dans l'appel d'offres, A2M a immédiatement choisi de proposer un bâtiment passif. Arch. Aline Branders (partenaire A2M), nous explique la raison de ce choix: “Nous étions pionniers à Bruxelles dans le domaine du passif pour de grands immeubles et bâtiments publics.

Le passif permet de réduire les besoins de chauffage et de climatisation du bâtiment tout en garantissant un confort optimal. Pour un bâtiment aussi compact, on pouvait atteindre ce standard assez facilement. Les énergies renouvelables peuvent alors venir en complément pour réduire encore les consommations. Au-delà des aspects énergétiques, nous souhaitons développer des projets qui répondent de façon globale et transversale à tous les défis de la durabilité.
Ce projet a d'ailleurs été lauréat de l'appel à projets Bâtiments Exemplaires de 2013 organisé par Bruxelles Environnement. Le choix des matériaux a été pris en compte de manière à limiter l'impact de la construction sur l'environnement. L'eau de pluie est réutilisée pour les sanitaires du bâtiment, les toitures vertes et les patios favorisent le développement de la biodiversité, l'éclairage naturel a été optimisé, etc. L'objectif est d'offrir un cadre de travail confortable aux occupants et aux visiteurs, tout en minimisant les impacts négatifs sur l'environnement et la santé."
TECHNIQUES APPLIQUEES
Afin d'atteindre le critère de conception passive de 15 kWh/m² en besoin de chauffage/an proposé par A2M, et de diminuer significativement les consommations d'énergies, diverses stratégies classiques ont été utilisées (isolation, étanchéité à l'air, ventilation). En plus, des solutions innovantes, comme les matériaux à changement de phase, ont été utilisées pour la première fois en Belgique. L'application de tous ces systèmes a d'abord été évaluée par le bureau d'études Crea-tec à l'aide de simulations dynamiques.
CONSTRUCTION ET ISOLATION

Les deux points principaux qui ont eu la plus grande influence dans la conception technique de la structure du bâtiment, étaient le confort qu'il offre au personnel qui y travaille, et la qualité des matériaux qui assurent le fonctionnement passif du bâtiment.
Hiver
Arch. Aline Branders: “Pour le volet confort, il y a une grande différence entre l'hiver et l'été. En hiver, l'isolation et l'étanchéité à l'air joueront un rôle très important. Les murs extérieurs sont isolés avec une couche de 20 cm d'épaisseur de polystyrène expansé graphité. L'étanchéité à l'air a été soignée au niveau de tous les raccords. Celle-ci a été réalisée essentiellement à l'aide d'un produit d'étanchéité à l'air liquide qui s'applique au pinceau, ce qui simplifie grandement la mise en œuvre."
La production de chaleur est assurée à l'aide d'une petite chaudière murale; les besoins de chauffage étant limités, les locaux sont chauffés par l'air de pulsion à l'aide de batteries terminales alimentées en eau chaude à partir de la chaudière. Il n'y a pas besoin de radiateurs dans le bâtiment. M. Coppen (Crea-tec) nous explique: “Le programme étant très dense et le terrain assez réduit, il n'y avait pas beaucoup de place pour intégrer toutes les fonctions.

Le local technique disposait également d'une taille limitée. Nous avons donc tout fait pour réduire les équipements techniques. Ici, nous avons une petite pièce dans laquelle tiennent le système de ventilation et le compresseur ainsi qu'un petit chauffage à gaz mural de type résidentiel pour préchauffer une partie de l'air de ventilation entrante."
La ventilation est d'une importance capitale pour un bâtiment passif qui est par définition étanche à l'air. Pour une qualité d'air saine, une circulation d'air et un apport d'air frais sont nécessaires. Le débit de la ventilation est déterminé par la quantité de CO2 mesurée dans chaque pièce du bâtiment. Ce niveau de CO2 indique le nombre de personnes présentes dans une pièce.
Le système compare le taux de ventilation nécessaire pour assurer le confort de ce groupe de personnes et ajuste le taux de ventilation. Dès que le niveau de CO2 diminue, la ventilation revient à un niveau minimum.
Eté
En été, les rayons du soleil sont bloqués par des pare-soleils externes. Les dalles en béton sont accessibles dans tout l'immeuble, car l'inertie thermique du béton contribue au caractère passif du bâtiment. En été, avec des températures chaudes et persistantes, le béton se réchauffe et cette inertie atteint ses limites. C'est pourquoi un système de refroidissement passif sur la base de matériaux à changement de phase a été installé dans les faux-plafonds. Enfin, la surface de toiture bien orientée est munie de panneaux solaires photovoltaïques qui couvrent environ 25% de la consommation annuelle d'électricité. Les endroits moins ensoleillés sont couverts d'un toit vert qui est composé de sédums.
LE PRINCIPE DU PCM

Dans la Maison de l'Emploi, cette technique a été utilisée pour la première fois en Belgique. PCM (Phase Change Material) est synonyme de matériau à changement de phase. Ce matériau peut absorber une grande quantité d'énergie thermique et la conserver pendant une longue période. Marc Coppen: “Ce phénomène est dû au fait que le matériau est constitué de petites capsules de paraffine de haute qualité fixées dans un substrat ou un gel. Les matériaux PCM sont proposés sous forme de plaques, de sacs, de granulés, etc. Le principe de fonctionnement des matériaux PCM est simple. La paraffine solide stocke la chaleur de l'environnement en subissant un changement d'agrégation (phase) et devient liquide. Etant donné que la chaleur est stockée dans le matériau, l'espace autour du matériau se refroidit. Le matériau n'absorbe pas la chaleur indéfiniment et l'effet de refroidissement s'arrête après un certain temps, mais la chaleur déjà absorbée reste contenue dans la paraffine liquide. Les plaques PCM redeviennent opérationnelles quand la chaleur contenue est libérée et que la paraffine durcit à nouveau, c'est-à-dire quand elle refroidit." Ce changement de phase peut être répété indéfiniment.
PCM et night cooling vont main dans la main
Dans ce cas-ci, le système PCM se présente sous forme de plaques de ± 8 mm. Le matériau PCM est recouvert d'une feuille d'aluminium épaisse et forme une plaque qui est facile à manipuler et qui peut être fixée au plafond au moyen de vis. Les trous des vis sont trop petits pour laisser s'écouler la paraffine liquide. Les ouvertures pour les armatures des luminaires peuvent facilement être sciées. Les bords sciés ou coupés doivent être recouverts d'une feuille d'aluminium adhésive pour empêcher des fuites de paraffine liquide. Afin de refroidir les plaques PCM, de l'air froid doit pouvoir circuler autour des plaques. Les plafonds sont en partie ouverts pour permettre à l'air d'accéder aux plaques PCM sur leurs deux faces. Ensuite, il a été prévu un système de night cooling (refroidissement de nuit) dans chaque local muni de plaques PCM. Ce refroidissement de nuit consiste en une fenêtre basculante qui s'ouvre automatiquement à l'aide d'un servomoteur quand les températures intérieures sont trop élevées et que les conditions extérieures le permettent. Comme les températures nocturnes sont inférieures aux températures diurnes, la chaleur stockée dans les plaques PCM est maintenant libérée par ce courant d'air frais. Au matin, la paraffine est complètement durcie et prête à absorber à nouveau la chaleur excessive des chaudes journées d'été.
UN MIX DE TECHNIQUES DURABLES
Pour conclure, un dernier mot de Mme Branders: “Au-delà des performances énergétiques, ce projet a pour ambition la durabilité au sens large, en prenant en compte tant les aspects écologiques qu'économiques et sociaux. Nous souhaitons continuer à tester des solutions et des produits innovants, et nous visons toujours des objectifs plus ambitieux, en allant vers des projets zéro énergie, zéro carbone, voire qui régénèrent l'environnement."
VENTILER, CHAUFFER ET REFROIDIR
Le système de ventilation utilisé dans ce projet est composé d'un échangeur de chaleur rotatif à roue thermique et d'une pompe à chaleur intégrée. L'unité est livrée avec prise, plug-and-play et all-in-one.
Cette solution innovante attire de plus en plus l'attention sur le marché et est capable de ventiler, chauffer et refroidir. En hiver, un échangeur de chaleur rotatif hygroscopique efficace récupère dans un premier temps la plus grande quantité de chaleur de l'air d'échappement. Dans un deuxième temps, le surplus de chaleur du côté de la décharge est recueilli par un évaporateur et ensuite dévié par le compresseur, ce qui permet de fournir de la chaleur supplémentaire à la batterie dans l'air d'alimentation. En mode refroidissement, l'énergie de refroidissement est également récupérée par la roue thermique. Après l'échangeur, l'air est plus froid après le rotor que l'air extérieur, ce qui rend le processus de refroidissement plus efficace et entraîne une consommation réduite du compresseur par rapport à un condenseur traditionnel.
Données techniques
- Gamme standard RHP
- Volume d'air nominal: 395-1.500 m³/h
- Puissance électrique maximale: 96-470 W
- Bruit: 30-35 dB (A)
- Gamme RHP Pro
Volume d'air nominal: 1.200-25.000 m³/h