La durabilité de l’hévéa de nouveau remise en question (à tort)
Matériau de récupération pour différentes applications extérieures
Pour des applications intérieures telles que les escaliers, le parquet, les meubles et les cadres de porte, on choisit de plus en plus souvent à l’heure actuelle le bois d’hévéa. Ce bois est importé d’Asie du Sud-Est comme matériau de récupération et est attractif en raison de son prix bon marché et de son usinabilité aisée. En même temps le bois d’hévéa dispose aussi de quelques points d’attention possibles, notamment en raison de sa faible classe de durabilité naturelle. Mais une approche correcte et professionnelle permet de les éviter. Par ailleurs, de nombreuses questions circulent encore à propos de la durabilité et de l’écologie du bois d’hévéa, mais ce n’est pas non plus sans nuances.
Origine
Le bois d’hévéa ou rubberwood (Hevea brasiliensis) est originaire d’Amérique du Sud, plus précisément du Brésil. A l’heure actuelle, l’Amérique du Sud ne représente toutefois qu’une petite partie du nombre d’arbres à caoutchouc dans le monde car les arbres ont été exportés vers d’autres régions tropicales. La production actuelle de bois d’hévéa se situe pour plus de 90% en Asie du Sud-Est, essentiellement dans les pays d’Indonésie, de Thaïlande et de Malaisie. Le bois importé dans nos contrées en est aussi originaire.
Le bois d’hévéa est en fait un matériau de récupération. Les arbres à caoutchouc servent en effet à produire du latex, la base du caoutchouc naturel. Mais après 25 à 30 ans, le rendement de la production de caoutchouc baisse et les arbres sont littéralement épuisés. Pour remplacer la plantation, les anciens arbres ont été tout simplement brûlés pour pouvoir planter de nouveau arbres. Puis les déchets de bois ont été utilisés dans la production de charbon de bois mais à l’heure actuelle, le bois d’hévéa est transformé en un matériau utile.


Propriétés
Le bois d’hévéa possède une couleur relativement blanche, avec des évolutions possibles vers le jaune clair au jaune paille avec parfois des teintes roses ou foncées. Cette couleur est influencée par la provenance du bois (support), le diamètre du tronc et le traitement que reçoit le bois d’hévéa.
Avantages
Le bois d’hévéa dispose de quelques propriétés importantes, ce qui en fait une essence attractive. Les nombreuses plantations de caoutchouc génèrent une offre large, ce qui en fait aussi une essence relativement bon marché. De plus, le bois d’hévéa peut se travailler aisément de façon manuelle et mécanique, et les possibilités de finition du produit fini sont nombreuses. Pour terminer, un avantage important est que la majorité du bois d’hévéa commercialisé en Europe est importée sous la forme de panneaux poncés prêts à l’emploi. Cela procure une économie d’heures-homme, de coûts de machine et de coûts d’énergie et de stockage.
Points d’attention possibles
- Un aspect du bois d’hévéa à prendre certainement en compte est sa durabilité limitée. Non traité, le bois appartient à la classe de durabilité V et est donc peu résistant aux moisissures. Le bois d’hévéa est aussi très sensible au bleuissement. L’attaque par les insectes constitue aussi un risque pour le bois d’hévéa non traité. Cependant les deux aspects peuvent être évités par une imprégnation correcte du bois d’hévéa (voir plus loin). Ces propriétés font que le bois d’hévéa se destine uniquement aux applications intérieures.
- Dans les panneaux encollés, on note parfois une différence de porosité des différentes lamelles. Ceci peut entraîner le boulochage de certaines lamelles pendant la coloration ou le vernissage. Ce problème peut être résolu par un ponçage et l’application d’une couche de finition supplémentaire.
- Pendant l’usinage du bois d’hévéa, il est en outre possible que du latex se libère. Mais étant donné que le bois est travaillé après avoir arrêté en grande partie la production, ce risque est plutôt limité. De plus, un bouche-pores peut faire en sorte que le bois d’hévéa ne sécrète plus de gomme.
Le bois d’hévéa dispose donc de quelques propriétés dont vous devez tenir compte. Mais le caractère déterminant de ces aspects dépend de l’application visée.
Usinage correct du bois d’hévéa
Imprégnation rapide
En partie en raison de la fiable durabilité naturelle du bois d’hévéa, il est important de traiter le bois aussi vite que possible après l’abattage (dans la semaine après l’abattage de l’arbre) pour éviter l’attaque par la moisissure bleue ou les insectes. Un premier traitement consiste à imprégner le bois d’hévéa dans des chaudrons sous vide sous haute pression. De cette manière les produits d’imprégnation sont introduits dans le bois, ce qui le protège de façon permanente.
Éviter le gauchissement

Le bois d’hévéa peut être transformé en lamellé collé ordinaire pouvant être utilisé pour toutes sortes d’applications intérieures telles que des escaliers
Non traité, le bois d’hévéa offre une stabilité limitée: en effet le bois provient de jeunes arbres, si bien qu’il a tendance à se déformer. Cependant cela peut être évité par un séchage et un stockage corrects.
Le séchage du bois d’hévéa se fait toujours dans un four ou une chambre de séchage. Pour le bois d’hévéa, la directive est que le taux d’humidité du bois après séchage doit se situer entre 8% et 12%. Il faut bel et bien tenir compte du retrait et du gonflement naturels du bois.
Le gauchissement est aussi évité en séchant le bois d’hévéa vers le taux d’humidité de consigne pour une certaine application. Pour les meubles et le parquet, on conseille par exemple un taux d’humidité du bois entre 8% et 11%. Mais la pièce dans laquelle le bois trouve son application ne peut pas non plus être trop sèche ou trop humide. Idéalement l’humidité relative de l’air de la pièce se situe entre 40% et 60%. Cela peut être obtenu au moyen d’un déshumidificateur ou humidificateur. Le bon taux d’humidité est crucial pour la stabilité du bois.
Plus de stabilité
Vu les dimensions limitées, le bois d’hévéa est souvent collé-lamellisé. L’encollage dans la longueur s’effectue aussi toujours selon le principe de l’aboutage. De cette manière, les conséquences négatives de la stabilité minime diminuent.
Grâce à l’aboutage, on peut créer de grandes longueurs parfaitement droites avec le bois d’hévéa. Après l’aboutage, les longues bandes doivent bel et bien être à nouveau séchées dans le four ou la chambre de séchage. La stabilité du panneau dépend en effet de deux facteurs: d’une part la différence dans le taux d’humidité du bois entre les deux bandes juxtaposées, et d’autre part la précision du rabotage. Après le séchage, les bandes sont corroyées sur quatre faces, puis les lattes rabotées passent le long d’un rouleau de colle et sont placées dans un moulin d’encollage. Le moulin est rempli jusqu’à la largeur de panneau désirée. Une presse comprime toutes les bandes ensemble. Après environ 25 minutes, les panneaux sont retirés et sont placés sur des blocs pour subir encore un léger séchage une troisième fois.
Applications
Le bois d’hévéa peut être utilisé de différentes manières pour une variété d’applications. Il peut être transformé en lamellé collé ordinaire pouvant être utilisé pour toutes sortes d’applications intérieures telles que des meubles ou parties de meuble (massifs), des plans de travail, le parquet, des cadres de porte ou des escaliers.
Par ailleurs, le bois d’hévéa convient parfaitement à la fabrication de petits objets d’usage ou des jouets. Ceci provient du fait que le bois d’hévéa traité de la bonne manière ne produit aucune saveur ou odeur. En raison de ses propriétés spécifiques, le bois d’hévéa ne convient pas aux applications extérieures.
Durabilité et écologie
Durabilité

Dans l’optique de la gestion durable des forêts, c’est effectivement une bonne chose de donner une seconde vie à l’arbre à caoutchouc mis au rebut. Nos forêts subissent en effet une forte pression, ce qui ne fait qu’accroître la demande de matériaux d’origine renouvelable. Mais il convient naturellement d’envisager toute l’histoire de différents points de vue.
Et deux éléments sont encore importants. Primo de nombreuses plantations de caoutchouc sont aménagées au détriment des forets naturelles, donc les antécédents du sol jouent aussi un rôle. A l’heure actuelle, on doit effectivement s’assurer que des forêts existantes ne disparaissent pas pour laisser la place à des plantations. Secundo il est important de vérifier que les activités sur la plantation d’arbres à caoutchouc se déroulent d’une façon socialement correcte.
Malheureusement des abus sont constatés sur de nombreuses plantations. Ici le bois certifié peut offrir la garantie requise (voir plus loin).
Écologie
L’écosystème peut être préservé par la gestion durable des plantations d’arbres à caoutchouc. C’est possible par exemple par la préservation du reste de la forêt naturelle. Une autre option consiste à réparer en partie la forêt naturelle et évoluer vers une sorte de paysage mosaïque. Une plantation d’arbres à caoutchouc présente en tout cas souvent les caractéristiques d’un écosystème de forêts. Idéalement ces caractéristiques sont naturellement conservées mais le plus souvent cela ne se fait pas parce qu’une autre plantation diminue la facilité de gestion de la plantation.
Le transport lointain suscite aussi des questions en matière d’écologie du bois d’hévéa. En effet, le bois est transporté par bateau dans des conteneurs en provenance du sud)est asiatique. Mais en comparaison du transport de bois de conifères scandinave ou russe –toujours transporté par camion –, c’est quand même nettement moins polluant. En outre, le bois d’hévéa est le plus souvent déjà travaillé (collé-lamellisé) avant d’être transporté, si bien que les rebuts restent sur place, que les pertes sont moindres et que le transport est épargné.
Certifié PEFC ou FSC
Les opérations sur les plantations de caoutchouc peuvent naturellement aussi être certifiées. D’après Bart Holvoet du FSC Belgium (Forest Stewardship Council), la certification FSC pour le bois d’hévéa est possible mais reste relativement limitée aujourd’hui en termes d’offre. D’une part le bois d’hévéa peut provenir de plantations mises au rebut qui retournent à l’abandon comme forêt semi-naturelle, et dont on peut récolter le bois d’hévéa. D’autre part, et c’est peut-être plus important, la certification FSC peut aussi être obtenue pour des plantations de caoutchouc encore actives, la faisabilité dépendant bel et bien fortement du contexte spécifique. Aujourd’hui la certification FSC du latex a déjà fait son entrée surtout dans les opérations qui sont également certifiées mais en raison d’une demande croissante de diverses industries, il est possible qu’une extension vers d’autres opérations intervienne avec le temps.
Un système de certification des forêts alternative qui peut aussi se porter garant de la certification du bois d’hévéa est le programme PEFC (Programme for Endorsement of Forest Certification Schemes).
Remerciements à: Cras sa, DB Hardwoods, FSC Belgium, Hogeschool Gent et Hout Info Bois