SOLUTIONS POUR LES PAROIS DE COMPARTIMENTAGE VITREES
Le vitrage coupe-feu n'est qu'une partie de l'histoire
Des exigences de compartimentage s’appliquent dans les bâtiments publics afin de limiter le risque de propagation d’un incendie et le dégagement de fumée afférent. Celui qui veut réaliser ce compartimentage coupe-feu de façon transparente et esthétique, a d’emblée l’avantage avec un vitrage coupe-feu. Dans cet article, nous commentons les différentes possibilités et points d’attention.

NORME DE BASE PREVENTION INCENDIE
Compartimentage
A l'exception des maisons unifamiliales, le risque de propagation du feu et son dégagement de fumée doivent être limités dans quasi tous les bâtiments. Cela se fait en subdivisant le bâtiment en compartiments. Un compartiment est une partie d'un bâtiment, éventuellement scindée en locaux, dont les parois, sols et plafonds empêchent la propagation des flammes vers les compartiments adjacents pendant un certain temps.
Un compartimentage est aussi crucial pour sécuriser les issues de secours.
Les dimensions maximales des compartiments et la résistance au feu minimale des constructions de séparation sont fixées dans la Norme de base Prévention de l'incendie (AR 7/7/94 avec les dernières modifications). En règle générale, la règle veut qu'un compartiment peut avoir une surface brute maximale de 2.500 m2, quoiqu'il existe des exceptions, notamment pour les parkings et les bâtiments bas.
Lors du controle du chantier, ce n'est pas tellement le vitrage qui doit etre controle, mais plutot ce qui se passe autour
Résistance au feu
La résistance au feu d'un élément désigne l'intervalle de temps durant lequel l'élément conserve sa fonction structurelle pendant un incendie et durant lequel il empêche la propagation des flammes. La résistance au feu est exprimée en multiples de trente minutes.
La résistance au feu minimale d'une construction de séparation dépend essentiellement de la hauteur du bâtiment. Dans les grandes lignes, ce qui suit, s'applique en Belgique:
- bâtiments bas (hauteur < 10 m): 30 minutes (60 minutes pour caves ou bâtiments avec plusieurs étages);
- bâtiments de hauteur moyenne (hauteur: 10-25 m): 60 minutes (120 minutes pour caves);
- bâtiments hauts (> 25 m): 120 minutes.
Pour les portes dans ces cloisons, les exigences sont différentes. En général, elles doivent avoir la moitié de la résistance au feu du mur, avec un minimum d'EI30, quoiqu'il existe aussi des dérogations, en fonction de la situation.
Essai d'incendie
La résistance au feu d'un élément est déterminée dans un essai d'incendie normalisé, exécuté par un laboratoire accrédité en Europe.
L'essai d'incendie s'effectue toujours sur l'élément complet et donc, dans le cas des parois intérieures transparentes, sur une construction comportant à la fois le cadre et le vitrage. L'élément de test doit mesurer au minimum 300 x 300 cm et être serti sur trois côtés. Pour vérifier quelle serait la réaction au feu d'une plus longue paroi, le quatrième côté est libéré. En fonction de la flexion de l'élément, les possibilités d'extrapolation de l'élément (reprises dans un rapport supplémentaire) peuvent être ainsi déterminées.
Pour les portes coupe-feu, on utilise en Belgique une méthode de test un peu plus stricte selon l'EI1. Dans la plupart des autres pays européens, on se base ici sur EI2.
En Belgique, trois aspects importants sont testés durant l'essai d'incendie: l'étanchéité aux flammes (E), l'isolation thermique (I) et la stabilité structurelle (R). Les exigences de résistance au feu pour les parois de compartimentage concernent les deux premiers, la résistance étant toujours déterminée sur la base de la plus mauvaise performance. Si l'on satisfait p.ex. durant 58 minutes aux normes pour l'étanchéité aux flammes et durant 67 minutes aux normes pour l'isolation thermique, l'élément a une résistance au feu (EI) de trente minutes. Dans plusieurs pays européens, par exemple aux Pays-Bas, la réduction du rayonnement (W) est également testée et prise en compte.
Moyennant une bonne préétude et une justification, des dérogations peuvent être autorisées en fonction de la norme incendie
VITRAGE COUPE-FEU
La base d'une paroi intérieure transparente coupe-feu est un vitrage coupe-feu structurel. Celle-ci peut être construite selon différents principes. Un poinçon sur le vitrage permet l'identification et indique la bonne position des éventuels revêtements et couches intermédiaires.
Verre armé poli
Avant, on utilisait beaucoup le verre armé poli. Aujourd'hui, ces produits ne satisfont toutefois plus aux exigences en vigueur et ne sont donc plus appliqués.
Verre trempé thermiquement précontraint
Dans le verre trempé thermiquement précontraint, le processus de trempe est spécialement adapté aux produits résistant au feu. Ce faisant, il peut satisfaire à certaines exigences en matière d'étanchéité aux flammes (E). En Belgique, ce vitrage n'est toutefois appliqué que de façon limitée. Aux Pays-Bas, l'exécution revêtue de ce vitrage est bel et bien populaire. Grâce au revêtement, ce vitrage offre toutefois les avantages requis en matière de réduction du rayonnement (W), une exigence qui ne s'applique pas ici.
Verre feuilleté avec couche intérieure intumescente
Un type de verre coupe-feu très utilisé en Belgique est un verre feuilleté, constitué d'une plaque de verre intérieure structurelle de 8 mm et de plaques de verre supplémentaires de 3 mm. Entre les différentes plaques de verre se trouve une couche intumescente. Celle-ci moussera lors de l'échauffement et servira d'isolation thermique pour la plaque de verre sous-jacente.
En fonction du nombre de couches, on peut réaliser une résistance au feu de 30, 60, 90, voire 120 minutes qui vaut dans une ou deux directions, en fonction de la disposition du système.
Dans la plupart des cas, la composition du verre est symétrique et la résistance au feu est valable dans deux directions.
Le verre coupe-feu avec une couche intermédiaire intumescente offre certains avantages importants. Selon l'application et le montage, ce type de verre se coupe aisément, après la production de la plaque de verre coupe-feu de base (env. 2 x3 m). Cela ne doit donc pas être fabriqué sur mesure. Pour ce qui est de la sécurité, l'aspect intéressant est que la couche intumescente devient opaque en moussant. En d'autres termes, l'incendie est dissimulé, ce qui déclenche moins la panique.
Un point d'attention important avec ce type de verre coupe-feu est toutefois que la couche intérieure intumescente ne résiste ni aux UV, ni à l'humidité. Les vitrages qui subissent un rayonnement UV, doivent dès lors être pourvus d'une plaque de verre supplémentaire avec un film PVB du côté exposé. Ceci est notamment un point d'attention important pour les façades et doit toujours être spécifié lors de la commande du verre. Pour garantir la résistance à l'humidité, il est important de ne pas enlever le film aluminium autour des panneaux de verre lors de la pose. Pour les applications de façade, on doit prévoir, en outre, une pose particulièrement imperméable avec des silicones. Du reste, ce type de verre ne peut pas être appliqué dans des environnements où la température peut dépasser 50 °C.
Verre trempé thermiquement avec gel coupe-feu
Un autre type important de verre coupe-feu est constitué de deux plaques de verre trempé (8 mm) accouplées à l'aide d'un espaçateur et entre lesquelles est injecté un gel. Dans le cas d'un incendie, la plaque de verre exposée se brisera, mais le gel gardera la plaque de verre qui se situe derrière, longtemps froide. L'intervalle, et dès lors l'épaisseur du gel, peut être adapté en fonction de la demande. Une couche de gel de 28 mm assure une résistance au feu de 120 minutes.
Le processus de production de base de ce type de verre est moins complexe que celui du verre coupe-feu avec une couche intérieure intumescente, mais les panneaux doivent toujours être réalisés sur mesure, ce qui réclame plus de temps.La couche de gel offrira une certaine obstruction visuelle en cas d'incendie, mais pas de la même façon que la couche de mousse dans un autre verre coupe-feu. Elle est bel et bien résistante aux UV.
Etant donné que les deux plaques de verre sont fixées l'une à l'autre par un espaçateur, ce type de verre comporte toujours un mince rebord coloré visible le long des bords de l'élément. Ce petit rebord peut être exécuté dans différentes couleurs et intégré comme élément esthétique.
Différents panneaux de verre peuvent être fixés l'un à l'autre à l'aide d'un joint de silicone coupe-feu aussi bien sur les vitrages coupe-feu avec une couche intumescente que sur les vitrages avec un gel coupe-feu isolant. Sur le premier type, le joint est généralement exécuté transparent; sur le second type, la couleur du joint de silicone peut être adaptée à la couleur du rebord visible.
CADRE
Le vitrage coupe-feu peut être placé dans différentes sortes de cadres. Certains fabricants de vitrages coupe-feu proposent même les profilés adaptés; d'autres laissent le choix au placeur ou prescripteur.
Dans ce dernier cas, les profilés choisis servent à satisfaire à certaines exigences spécifiques.
Bois
Pour les cadres en bois, on doit tenir compte de la densité du bois choisi et des dimensions du profilé.
Les valeurs minimales pour les deux aspects dépendent du type de verre et de la résistance au feu visée, et sont spécifiées dans le manuel du fournisseur.
Acier
On peut aussi utiliser un cadre en acier. Des profilés en acier, constitués de deux profilés gaines, et avec des dimensions standard de 50 x 20 x 2 mm, suffisent généralement.
Des spécifications complémentaires sont décrites dans le manuel, tout comme pour les profilés en bois.
Silicate de calcium
Certains fabricants proposent aussi un cadre de silicate de calcium. Ce cadre a l'avantage de pouvoir être caché dans la finition de paroi et de se fondre donc dans l'architecture. A nouveau, les spécifications relatives à l'épaisseur du cadre sont décrites dans le manuel.
MONTAGE
Système total
Les parois intérieures transparentes coupe-feu sont considérées et testées comme système total, verre et cadre. Lors de la pose, il est extrêmement important que le placeur s'en tienne aux rapports de l'essai d'incendie ou aux prescriptions du fabricant. En effet, la résistance au feu n'est garantie que si la paroi est réalisée conformément au rapport de classification et d'extrapolation. Lorsque les profilés ne sont pas livrés avec le verre coupe-feu, l'architecte ou le placeur doit choisir un cadre qui satisfait aux prescriptions de pose. Si l'on veut exécuter une paroi plus grande que ce qui est autorisé selon l'essai d'incendie et les rapports d'extrapolation correspondants, le titulaire de l'attestation peut demander une dérogation auprès de l'ISIB. Ceci se fait en remettant un rapport qui montre la résistance au feu de la dérogation sur la base d'autres rapports. L'ISIB décide ensuite si la dérogation peut être autorisée et quelles sont les prescriptions (de pose) qui y sont associées. L'exécution doit s'effectuer ensuite en totale conformité avec ce rapport.
Prescriptions de pose
En principe, les prescriptions de pose sont communiquées dans le manuel du producteur. Si l'on ne dispose pas du manuel, on peut demander les dispositions sur la base des numéros de rapport.
Les prescriptions de pose concernent:
- le matériau, les dimensions et la fixation du cadre;
- le remplissage entre le gros œuvre et le cadre;
- le jeu entre le verre et le cadre;
- le joint de silicone entre panneaux de verre;
- les dimensions maximales d'une seule plaque de verre;
- les dimensions maximales de la paroi totale (cadre compris et non compris);
- la séquence du montage;
- …
Contrôle du chantier
Outre un contrôle approfondi par l'architecte et/ou bureau de contrôle lors de la réception, des contrôles de chantier intermédiaires sont conseillés lors de la pose de parois de compartimentage vitrées.
Ce n'est pas tellement le vitrage qui doit être contrôlé - vérifiez que le verre est pourvu du bon poinçon, et inspectez la présence de dégâts, mais plutôt ce qui se passe autour. Le masticage, les joints de dilatation, les blocs d'appui (ininflammables) et les éventuelles bandes céramiques sont d'importants points d'attention. Contrôlez donc toujours qu'ils sont exécutés selon les prescriptions de pose du fabricant.
Attestation de conformité
Pour montrer que la pose d'une paroi intérieure coupe-feu est exécutée selon les directives postulées, le poseur doit délivrer une attestation de conformité. Si cette attestation n'était que rarement rédigée auparavant, elle semble être aujourd'hui un document de plus en plus important lors des contrôles des services d'incendie. C'est pour cette raison qu'on demande aux architectes de toujours demander l'attestation de conformité au placeur.
Déroger aux prescriptions d'incendie?
Les architectes sont régulièrement confrontées à une certaine incompatibilité entre les exigences minimales pour la résistance au feu d'une part et les exigences fonctionnelles et/ou esthétiques du projet de construction d'autre part.
Heureusement, cela ne signifie pas nécessairement une cause perdue. En effet, des dérogations et des exceptions à la norme incendie sont de plus en plus souvent autorisées.
Pour cela, on s'adresse à la Commission des Dérogations au sein du SPF Affaires intérieures ou au SPF ETCS.
L'accent sur la performance du système
On ne peut effectivement pas déroger ainsi à la norme incendie. En contrepartie à l'exigence de résistance au feu abaissée pour les parois de compartimentage, il faut toujours une autre intervention qui augmente la sécurité incendie. Quand on ne doit pas satisfaire aux dispositions concrètes de la norme incendie, la performance du système doit en effet également être garantie.
Solution
Une solution très utilisée dans de telles situations consiste à prévoir une installation de sprinklers, mais il est par exemple aussi possible de prévoir des parois de compartimentage plus grandes, cependant moins performantes.
Des solutions standard n'existent pas. Les alternatives existantes et la réduction de l'exigence de résistance au feu qu'elles induisent, dépendent toujours des propriétés spécifiques du projet.
Ce projet de construction en hauteur à Bruxelles abrite plusieurs bureaux. En raison de la présence de voies d'évacuation (externes) qui longent la façade, l'exigence de l'EI120 s'applique pour la façade en principe. En plaçant une installation de sprinklers, une dérogation qui ramène l'exigence pour la façade à EI0, a toutefois été obtenue.
Remerciements à Fire Engineered Solutions bvba, Meyvaert Fire & Security et Promat