LE BATIMENT PROTEGE LOODS 23 REVIT
Des lofts où vivre et travailler sur le site dans l’Avant-Port de Gand
Pour Locus Developments BVBA, l’entrepreneur Vandenbussche NV réalise, en équipe de construction avec Compagnie-O Architecten BVBA et le bureau d’études en stabilité LIME BVBA, le projet de construction original Loods 23 dans l’Avant-Port de Gand. Le projet concerne un gigantesque hangar à coton protégé du 19e siècle impliquant d’énormes défis, comme la création d’un parking souterrain sous le hangar existant, l’adaptation de la superficie afin d’obtenir suffisamment de lumière et la bonne acoustique, la conservation du ‘monument protégé’ et la réalisation d’un bâtiment et d’un site neutres sur le plan climatique. Locus n’en est pas à son coup d’essai avec ce bâtiment. Dans ce quartier, ce promoteur immobilier ambitieux a déjà rénové et construit plus de 1 kilomètre de bâtiments, dans le respect de l’histoire et avec une vision à long terme.
HISTORIQUE
Le projet Loods 23 dans l’Avant-Port de Gand s’inscrit dans un ensemble plus vaste et remonte à la fin du 19e siècle. “L’Avant-Port a été construit par le jeune ingénieur urbain, Emile Braun. Il a doublé la capacité du port de Gand en développant l’Avant-Port avec une longueur de quai de plus de 1 km, où 6 hangars à coton en acier ont été construits”, raconte Dirk Valvekens, propriétaire de Locus Developments. “En raison du tonnage sans cesse croissant des bateaux, l’Avant-Port est vite devenu trop petit. A la fin des années 80, alors que mon amie et moi cherchions un loft à Gand, nous avons remarqué que les deux hangars (hangars 20 et 24) étaient malheureusement démolis. Nous avons réagi assez rapidement et sommes heureusement parvenus à empêcher la démolition des hangars 22 et 23. En 1996, le site est devenu protégé. Après plus de 12 ans, la Ville de Gand a vendu en 2002 une importante partie de l’Avant-Port.”
COLLABORATION AVEC MONUMENTENZORG – RESTAURATION DE LA STRUCTURE EN ACIER
Pour Loods 23 et Loods 22, une collaboration est mise en place avec l’instance Monumentenzorg.
“Nous sommes face à une technique de construction spéciale, dans le cadre de laquelle de nouveaux éléments en acier sont couplés à d’anciens éléments à l’aide de rivets. Monumentenzorg permet l’utilisation et la combinaison de ces techniques et matériaux historiques et nouveaux (au lieu de tout démolir et imiter avec de nouveaux matériaux). Cela détermine le style et le caractère du bâtiment”, explique Francis Delacroix.
Dirk Valvekens: “Il est extrêmement important de conserver les éléments historiques. Je veux montrer comment cela était avant, et exprimer l’esprit de ce site à l’époque. Le hangar était utilisé autrefois pour le transport de bétail. C’est pourquoi je tiens à recréer un ancien local de pesée pour les animaux, témoin des anciennes fondations.
Jonas Landuyt: “Lors de l’aménagement du talus du puits de fondation, les rails ont été retirés. A l’entrée de la cave, la voie ferrée sera remise en place. Elle rentrera pour ainsi dire pour réapparaître à la sortie et continuer sur le site, souvenir de l’infrastructure ferroviaire d’il y a des années. Cela avait été à l’époque une énorme évolution, la possibilité de poursuivre le transport de grosses choses à terre.”
TECHNIQUES NEUTRES SUR LE PLAN CLIMATIQUE
“Nous souhaiterions réaliser un avant-port neutre sur le plan climatique, mais pour le moment, il n’y a pas de place pour des forages géothermiques. De nouvelles techniques sont toutefois testées actuellement aux Pays-Bas à l’aide de panneaux solaires invisibles sur le toit, avec les mêmes effets que la géothermie. Nous voyons aussi l’évolution de la borne de recharge pour les voitures électriques au niveau du hangar 22. Il y a deux ans, elle était à peine utilisée. Aujourd’hui, elle l’est constamment. Les voitures pourront également être chargées dans le parking souterrain et nous voulons introduire des systèmes de distribution de charge intelligents, afin de pouvoir charger selon la priorité.”
PREMIERE PHASE - LOODS 22
De 2008 à 2010, une première phase portait sur le volet Loods 22. Ce hangar d’une superficie d’env. 3.500 m² par étage a été transformé en 17 espaces d’entreprise au rez-de-chaussée et 22 lofts en duplex au premier étage.
Francis Catteeuw, architecte, Compagnie-O Architecten: “A la suite de notre participation à un miniconcours pour ce projet, nous avons décroché le marché. Nous avions alors présenté un concept clair et simple, dans le cadre duquel nous adoptions une attitude correcte vis-à-vis du bâtiment. Nous veillions à laisser s’exprimer toutes les qualités de ce bâtiment. Une fois que nous nous sommes mis au travail, il a fallu longtemps avant que nous connaissions tous les paramètres. Je pense concrètement au compartimentage du bâtiment pour la sécurité incendie, à la restauration de la structure en acier, à la création de suffisamment de lumière, à l’adaptation de l’acoustique d’un entrepôt pour garantir le confort des occupants.”
Francis Delacroix, ingénieur en stabilité chez LIME BVBA et également habitant de Loods 22: “C’est chouette de voir comme le quartier revit. La journée, il y a de l’animation grâce à l’utilisation des bureaux et le soir, ce sont les activités des gens qui y vivent, qui prennent le relais.”
DEUXIEME PHASE - LOODS 23
En équipe de construction
La transformation de Loods 23 est actuellement en cours à côté du Loods 22 existant. Les travaux ont débuté en juin 2017 et devraient être bouclés en novembre 2019. Ses 11.000 m² de superficie représentent 18 espaces d’entreprise, 24 lofts et une cave souterraine avec plus de 100 places de parking et 24 remises.
Pour Loods 23, il a été décidé de réaliser le projet en équipe de construction. L’équipe d’experts s’est réunie autour de la table dès le début du projet afin d’aboutir à un projet réalisable. “Je suis convaincu par l’équipe de construction”, déclare Dirk Valvekens, maître d’œuvre. “Pourquoi ne collaboreriez-vous pas en tant que promoteur tôt dans le projet avec un entrepreneur si vous sentez que cela colle? Durant tout le projet, il y a eu une confiance mutuelle et une grande maturité.”
Francis Delacroix approuve: “Il est intéressant de réunir le savoir-faire des différentes parties dans ce projet. En tant qu’architecte et ingénieur, vous regardez le chantier autrement à partir du dossier que l’entrepreneur, qui peut lui plus contribuer sur le plan de l’expérience de chantier, de la maîtrise des coûts et de l’organisation de chantier. Si vous êtes donc impliqué dès le début, cela est utile pour tout le monde.”
Réalisation technique de la cave
Un parking souterrain a été construit sous Loods 23. Une tâche quasiment impossible d’un point de vue technique. Les autorités ne s’attendaient sans doute pas à ce que cela soit réalisable. Dirk Valvekens: “Parfois, il faut dépenser énormément d’énergie pour trouver une solution innovante. Le secteur de la construction ne fait pas exception à la règle. Je pars du principe que peu de problèmes sont trop compliqués pour pouvoir être résolus. Avec Francis Delacroix, nous avons un ingénieur en stabilité dans l’équipe de construction, proposant des solutions. Nous avons confié l’élaboration du concept pour ce parking souterrain au bureau d’études LIME. Cela a donné lieu à une collaboration intense.”
Francis Delacroix: “Quand on m’a demandé de me pencher sur ce problème, j’ai trouvé qu’il s’agissait à la fois d’un grand honneur et d’un sérieux défi. Je suis arrivé avec un concept qui a été présenté à l’équipe de construction. Je me souviens encore bien de tous ces regards pleins de doutes, mais j’entends aussi encore Dirk dire: “Si cela a de l’avenir et que cela représente une plus-value pour le bâtiment, nous pouvons creuser l’idée.” Et c’est ainsi que nous sommes parvenus à une solution qui a peu à peu encore été rectifiée. Le principe de base, c’est qu’il fallait une structure de soutien pour la superstructure. Je l’avais prévue pour être à la fois la structure définitive du parking couvert, en tenant compte du positionnement des colonnes pour soutenir la superstructure et aménager l’espace en parking. Nous avons ainsi opté pour une solution économique.”
“Chaque problème complexe a sa solution. Mais il n’y a pas de solution standard, il faut oser réfléchir au-delà des données purement chiffrées. Il faut parfois sentir le bâtiment. On n’aborde pas une rénovation comme une construction neuve. Il faut oser réfléchir à ce qui se passera si on enlève une partie de la fondation. Parfois, on aboutit à une solution grâce à une approche complètement différente.”
Jonas Landuyt: “Nous ne pouvions pas dégager toutes les fondations existantes de 1 axe en une fois en raison du risque de cassure. En tant qu’hommes du chantier, nous étions tout de même un peu critiques et avons réfléchi avec LIME à comment exécuter un axe entier en une fois. Nous avons alors eu l’idée d’enfoncer un poteau en acier dans le sol, à côté de la fondation existante, servant de colonne et de fondation. Finalement, il y a moins de colonnes dans la cave aujourd’hui qu’il n’y avait de fondations maçonnées avant.”
“Outre l’aspect technique, le parking est également un espace esthétique. Il présente un plafond lisse, grâce à un système de poutrelles et d’entrevous, et une hauteur de 2,40 mètres. Cela accroît la valeur des places de parking. On peut entrer avec des voitures avec un coffre de toit et plus d’espace d’empilement peut être créé. Nous pensons toujours en fonction de l’utilisateur final lors d’optimisations. J’entends parfois qu’on parle de living pour les voitures,” s’esclaffe Dirk Valvekens, “et cela fait plaisir à entendre”.
Exercice de changement d’échelle par l’architecte
Francis Catteeuw: “Ce gigantesque bâtiment était à l’origine adapté aux bateaux et aux trains, et servait d’entrepôt et de lieu de transbordement pour l’industrie du coton. Faire entrer dans un bâtiment de 40 mètres de largeur sur 100 mètres de longueur suffisamment de lumière dans chaque loft et chaque bureau représente un défi de taille. Au rez-de-chaussée, nous travaillons avec de grandes fenêtres de 5 mètres de hauteur à l’aide de la structure existante. A l’étage, la façade a été reculée. Nous obtenons, de ce fait, un peu moins de superficie au sol à l’intérieur, mais créons une belle terrasse, tandis que la structure du toit existante est visible à l’extérieur aussi. Cela permet également d’avoir des fenêtres plus hautes. Elles arrivent juste sous la toiture en pente et mesurent ainsi 4,70 mètres de hauteur. Grâce aux grandes fenêtres et fenêtres de toit, beaucoup de lumière entre et on a une impression d’espace, ce qui améliore la qualité de vie."
"L’acoustique est également très importante. C’est pourquoi nous avons par exemple opté pour des cloisons intermédiaires dédoublées en carton-plâtre, ce qui était donc bien pour que la structure de l’étage supérieur ne soit pas trop lourde. Les cloisons de séparation consistent en une contre-cloison dédoublée en carton-plâtre, dotée d’isolation en laine minérale et finie à chaque fois avec 3 plaques de carton-plâtre. Ces cloisons constituent aussi une solution pour le compartimentage relatif aux incendies."
"Le chauffage par le sol et la climatisation sont, en outre, possibles dans les bureaux. Pour les lofts, une bonne isolation est prévue, ainsi qu’une possibilité de placer des protections solaires”, souligne encore l’architecte.
AVENIR
Habiter et travailler à Loods 23 offre une plus-value. Les bureaux sont bien situés géographiquement et le plan de mobilité améliorera encore la situation. Le parking spacieux et le caractère historique des bâtiments constituent un véritable atout. Avec l’ASBL De Voorhaven, reposant sur le bénévolat et comptant plus de 600 membres, le patrimoine industriel est régulièrement mis en avant, à chaque fois avec une approche culinaire; regarder des monuments, cela ouvre, en effet, l’appétit!
“Notre prochain objectif concerne Loods 20. Un bâtiment similaire, mais avec une autre fonction de soutien pour le quartier. Nous planchons sur un concept avec un supermarché de quartier, un hôtel et autres”, explique Dirk Valvekens.
“Avec le terrain de Loods 24, propriété de la Ville de Gand, nous rêvons que la ville s’engage avec nous pour proposer une infrastructure sportive sous la forme d’un hangar de sport couvert ouvert. Ce hangar présente un aspect similaire, mais est construit avec de nouveaux matériaux afin qu’on puisse également faire du sport à l’intérieur en cas de pluie ou de grand soleil. Nous nous inspirons pour cela de nos séjours réguliers à New York, où on trouve quelque chose de similaire au Brooklyn Bridge Park. Nous sommes conscients qu’il faut plus de temps en Belgique pour changer les mentalités, mais nous pensons que cela est possible. Nous voulons devenir un quartier dynamique et regardons le site entier dans son ensemble. Nous sommes très fiers de ce que nous avons réalisé, mais n’avons pas encore fini”, poursuit le promoteur immobilier. “Nous voyons que le quartier revit. Les lofts comme les bureaux sont déjà presque tous vendus avant même que le bâtiment soit prêt. Le concept cartonne et a surtout un impact local.”
CONCLUSION
“Le projet atypique, le tableau complet, l’historique du bâtiment, … chaque aspect a fait l’objet d’une réflexion intense. L’échelle de ce gigantesque bâtiment est énorme et les défis techniques ne sont pas des moindres, au niveau du gros œuvre comme de la phase de parachèvement. Durant tout le processus de construction, la structure en acier du hangar protégé est restée en place et est restée intacte. En raison de la trame de la structure du toit et du sol intermédiaire, il n’était pas possible de travailler avec une grue-tour. On a utilisé autant que possible un chariot à déport de charge ou une petite excavatrice, mais cela a également impliqué beaucoup de travail manuel. Nos ouvriers et sous-traitants ont fourni ici un résultat fantastique grâce à leur motivation au quotidien dans des conditions de chantier atypiques”, conclut Jonas Landuyt.
Francis Catteeuw, architecte: “Nous sommes souvent encore estomaqués par l’échelle de ce projet. La différence entre le plan A0 et le bâtiment reste irréelle par rapport à d’autres projets 5 fois plus petits.”
Francis Delacroix, ingénieur en stabilité: “Il s’agit d’un défi très technique. Des centaines de personnes ont collaboré à ce bâtiment et nous ne l’oublierons pas de sitôt. Chez Vandenbussche, ils organisent encore une fête du 1er mai pour leurs ouvriers ayant travaillé des mois ici sur le chantier. Cela ne se voit plus beaucoup.”
Dirk Valvekens, promoteur immobilier: “C’est agréable de pouvoir avoir un impact avec une histoire d’une telle envergure. Cela est fascinant et rend les choses plaisantes. Nous espérons pouvoir encore étendre le site avec des bâtiments présentant le même aspect, mais une autre fonction.”
Photos de Locus Developments (www.locus.be)
Photographes: Ruth Wytinck, Thomas Callens en Jo De Rammelaere
